C'est vide. Tu ne te souviens plus de rien. Il n'y a que de la fumée, des vapeurs euphoriques dansant dans l'atmosphère dans un rythme extatique.
Il y avait aussi cette étrange voix qui te susurrait des belles paroles avant que tu fermes tes prunelles viroles. C'était ta mère, ta génitrice dont tu as oublié le visage. Il n'y a que cette aura apaisante, seule capable de te calmer dans tes crises de folies. Car oui, tu étais fou, dément. Mais elle ne cessait de te répéter : « Les meilleures personnes le sont. »
C'est ce que tu continuas de répéter à cette tendre Alice quand elle venait se perdre dans le pays des merveilles. Car oui tu es passé du légendaire typhon, sale petit démon au grand sage déluré et névrosé, qui ne peut s'empêcher d'avoir un quota de bonnes et mauvaises actions dans la journée, qui te crache à la figure son étouffante fumée,
avant de disparaître,
dans ses méandres,
à jamais.
J'attendais que le soleil se couche
c'était si beau les lumières à l'horizon je voyais à chaque aurore Gaïa me sourire
la terre est devenu une poubelle au fil des années
mais son sourire m'émerveille à jamais
je sais qu'elle est là, auprès de moi
comme une écorchure qu'on a sur le palais qui ne cicatrice pas
comme un air irrespirable qu'on s'amuse à inspirer pour tousser
comme une mère qu'on déteste de nous avoir abandonner
Je n'ai jamais aimé personne personne n'a réussi à faire battre mon cœur bien sûr si j'en avais un
mais je n'en ai pas
je n'ai que des poumons putrides et cupides
avides de cette substance qui ne me procure que du bien
C'est la nuit enfin
c'est l'hérésie qui ronge mon être, qui me dévore lentement comme un parasite
j'avais envie de courir, comme autrefois
j'avais cette impression d'avoir de l'acide dans les veines
et j'ai couru encore
je me souviens alors de la tête d'alice la première fois
la première fois que je lui ai soufflé la fumée au visage
elle a toussé et a froncé les sourcils
c'est peut-être la seule personne que j'ai vraiment aimé
cette idiote je la déteste Alice je suis seul aide moi à trouver la voie, je veux partir la planter comme une idiote, qu'elle se débrouille qu'elle se perde je suis un cyclone pas un guide touristique
mais je reste planté devant elle avec mon sarcasme à deux balles
et ça la fait rire
j'adore son rire
son rire est dégueulasse.
Qui suis-je au juste ? Un jour un dieu, un autre une chenille.
Tellement pathétique, je cherche une raison à ma fonction je me met au chômage technique
J'ai grandi il y a quelques millénaires, je ne sais plus
j'ai mûri il y a quelques siècles, sûrement
J'ai attendu Gaïa à la station d'essence, je t'ai attendu mais tu n'es pas venu, la lumière des phares dans la gueule j'ai vomi par terre
aide moi aide moi aide moi je t'en supplie
non.
Je ne supplie jamais.
Je suis perdu, il va peut-être falloir arrêter de déconner
je vous rassure je ne suis pas tous le temps comme ça
mais c'est amusant de vous voir aussi paumé que moi.
Pour résumer je suis Typhon, fils de Gaia et une certaine Alice a fait de moi la sagesse du pays des merveilles.
Du pays des poubelles plutôt.
Qu'on me dise pas qu'elle a pas respiré des champignons hallucinogènes.
Un beau gosse comme moi n'a rien d'une saleté de millpattes.
Je veux je veux je veux je veux je veux te dire avant d'aller me coucher
car même si je meurs éternellement j'ai donc le temps de dormir
même si je passe la nuit à courir après mes rêves
Gaïa je t'ai aimé en premier
à mes vents déchaînés, à mes cyclones dédicacés
je voulais te dire
J'ai le cancer.
Non, je suis le cancer.
Opium.